La Transfiguration du Seigneur

2^e Dimanche de Carême – A
Matthieu 17.1–9
Par la Croix vers la Gloire

Sœurs et frères bien aimés,

Depuis plus d’une semaine, l’Eglise notre Mère nous invitait, en compagnie de son divin Epoux, à parcourir un merveilleux chemin vers la lumière. Et Dimanche dernier, ce divin Epoux, qu’est le Christ, nous a emmenés au désert où nous L’avions vu sous son aspect le plus humain ; car Il était tenté de faire des choix contraires à Sa vie de Fils de Dieu. Il a préféré rester un homme ordinaire éprouvant la faim et subir la condition humaine, sans aucun privilège. Mais en ce 2^e Dimanche de Carême A, c’est le Mont Thabor qu’Il nous invite à gravir pour qu’à la suite de Pierre, Jacques et Jean, nous puissions Le contempler dans Sa Gloire.

En effet, la Transfiguration est une icône de notre rédemption. Elle constitue l’une des plus importantes scènes du Nouveau Testament. Elle est en fait, non pas le sommet (ce qu’est la Pâques), mais le résumé de toute la Révélation. Nous y voyons Moïse et Élie, les Portes-parole de la Loi et des prophètes, en un mot, les Colonnes de l’Ancien Testament, les grands témoins de l'accomplissement des Ecritures. Et que faisaient-ils sur le Thabor ?

Ils conversèrent avec Jésus. Mais c’est fondamentalement le Christ qu’ils viennent montrer aux Apôtres Pierre, Jacques et Jean - les “colonnes de l’Église” selon l’expression de Paul dans sa lettre aux Galates(2,9) - responsables d’annoncer la Bonne Nouvelle au monde entier. Ils leur montraient comment tout ce qu'ils ont enseigné et annoncé de la part de Dieu s'accomplit en Jésus. Et pour bien le comprendre, il faut retourner à une étrange annonce que Jésus avait faite aux Apôtres une semaine avant.

Souvenons-nous du moment où ils étaient dans la région de Césarée de Philippe lorsqu’Il les questionna à Son sujet d’après les dire des gens… Et tout de suite, sachant le temps venu pour accomplir ce pour quoi Il était venu dans le monde, - porter toute la faiblesse et la douleur qui accablent l'humanité, nous rendre la Vie divine en nous arrachant du cercle vicieux du péché et de la mort, de telle manière qu'une fois la mort vaincue, elle ne puisse plus jamais réduire les hommes, créés à l'image et ressemblance de Dieu, en esclavage-, Jésus leur annonça Sa passion et Sa mort inévitables (Mt 16,13…).

Ainsi, nonobstant l’annonce de Sa résurrection, nous pouvons imaginer l'angoisse qu’Il a provoquée dans leur cœur. En réalité, ils n'étaient pas prêts pour voir souffrir leur Seigneur. Lui qui avait toujours montré de la compassion envers les malades, qui avait blanchi la peau des lépreux, qui avait illuminé le regard de tant d'aveugles, qui avait fait bouger les membres estropiés, qui avait donné à manger à tant de monde, qui avait réanimé tant de morts… maintenant, ce n'était pas possible que Son corps soit défiguré par les coups et les flagellations. Bref, Lui qui avait transfiguré tant de vies défigurées, il est incompréhensible, voire impossible, à ce que la Sienne soit défigurée à son tour.

Cependant, en dépit de leur incompréhension, Il les emmenait à l’écart, - comme Dieu son Père qui a conduit Moïse et Élie sur la sainte Montagne pour y être témoins de Sa gloire (Ex 33.18-23 ; 1R 19.9-12) -, les faisait gravir, eux aussi, la montagne et, là, Il leur manifesta Sa gloire. Oui, comme Moïse et Élie, ces deux grands témoins de l’Ancienne Alliance, qui, d’une certaine façon, ont échappé à la corruption de la mort (Dt 34.6 ; 2R 2.11), Jésus aussi, qui vient d’annoncer Sa passion et Sa mort, donne aux Apôtres un avant-goût de Sa résurrection.

Quant à nous, c’est surtout à la suite de saint Pierre que nous allons participer à cet événement unique de la vie de Jésus. Car s’il y a quelqu’un qui a osé se manifester ce jour-là, c’est bien Pierre. Il était heureux, si bien qu’il voulait que cela dure longtemps. C’est pour cela qu’il voulait dresser trois tentes. Il veut que Jésus, Moïse et Elie puissent demeurer là devant lui, dans l’éclat et la splendeur de la gloire. C’est cela qu’il veut avoir devant les yeux pour toujours. Et il s’en souviendra longtemps.

La transfiguration du Seigneur l’a tellement marqué qu’il en a longuement parlé dans sa deuxième lettre (2P 1,16-18). Avec lui, voyons ce qui s’est passé : « Au sujet de la puissance de notre Seigneur Jésus Christ, nous ne reprenions pas des fables bien tournées : nous-mêmes avons contemplé Sa grandeur quand Il a reçu honneur et gloire de Dieu le Père. Alors, des paroles extraordinaires Lui ont été adressées dans la nuée par la glorieuse Majesté : ‘Voici mon Fils, le Bien-aimé, Celui en qui Je Me complais’. Cette voix envoyée du ciel, nous l’avons entendue, car nous étions avec Lui sur la sainte montagne. »

La nuée mentionnée ici est celle qui, dans divers épisodes de l’Ancien Testament, indiquait et dissimulait la mystérieuse présence de Dieu (Ex 19 ; 1R 8.10). Là-dans, le Père Lui-même intervenait, comme Il l’a déjà fait pour Jean-Baptiste et ceux qui étaient présents dans le Jourdain lors du baptême de Jésus: Écoutez-le ! Écoutez-le car Il est la Parole faite chair (Jn 1.14 ; He 1.1). Il est Le Prophète, et tous les autres ne parlaient que de Lui (Dt 18.17).

En réalité, les apôtres accompagnaient Jésus depuis trois ans, et peu à peu le fossé se creusait entre les autorités religieuses et ce Jésus auquel ils se sont attachés. La question pouvait alors se poser pour eux : Jésus ne Se trompe-t-Il pas Lui-même ? Ne devrions-nous pas nous mettre du côté des Prêtres et des Scribes ? Ainsi le Père les rassura : « Écoutez-le ! » Car la Loi (Moïse) passe ; les Prophètes (Elie) passent ; seule la Sagesse (Jésus) demeure éternellement. Ecoutez-Le, parce que Je n’ai plus d’autre Parole à vous donner ; le Christ est Mon tout-dire (St Jean de la Croix). Maintenant, Ecoutons-Le nous parler…

Mon petit frère / ma petite sœur,

N’avais-tu jamais déjà connu ou entendu l’histoire ou le témoignage de vies transfigurées ? Je suis persuadé que oui. Mais sais-tu comment cela a commencé ? Cela a commencé par une rencontre avec Moi, le Seigneur. Et si tu écoutes des convertis ou des personnes qui ont (re) découvert la foi, tu constateras que c'est quelque chose d'extraordinaire pour elles. Cette rencontre a complètement changé leur vie, car elle les a amenées à (re) découvrir l’Essentiel, Moi. Je les ai fait passer d'une vie défigurée par le péché, par la drogue, par la malfaisance, par le désespoir, par l’individualisme, par l'égoïsme, par la jalousie,  par l'hypocrisie et par toutes sortes de péchés à une vie lumineuse de liberté, de paix, de bienveillance et de joie. Oui, Mon pardon a été pour elles un nouveau point de départ, une nouvelle chance, pour une vie entièrement transformée ; car «là où le péché a abondé, la grâce a surabondé». Ne le lis-tu pas dans la lettre Romains (5,20) ?

Toi aussi, Je te connais. Tu as été transfiguré-e le jour de ton Baptême. Mais le péché te défigure. Au fait, Je connais tout ce qui n’est pas humain et divin en toi, et qui défigure ta vie. Ce n’est pas digne de toi: tu as été créé-e à l’image comme à la ressemble de ton Créateur (Gn 1,26). Il est temps pour toi de récupérer ta lettre de noblesse. En effet, je te l’ai déjà rendue depuis l’Evénement pascal, mais tu n’en es pas conscient-e. Voilà pourquoi, aujourd’hui Je t’invite à Me faire une totale confiance et, du coup, reprendre la marche avec Moi, ton Dieu.

Je ne vais pas t’éviter les souffrances ni les peines de la vie ; elles sont pour toi une occasion de donner la preuve de ta foi. Je ne te promets non plus de te conduire jusqu’au Thabor historique, mais à quelque chose de plus grand, jusqu’à la résurrection afin que tu puisses participer à  Ma gloire.

Oui, le Thabor que Je t’invite à gravir n’est pas celui qui est en Israël, mais le Thabor spirituel, l’Eglise, mon Corps mystique. Ouvre-toi à Moi afin que je te fasse passer d’une vie défigurée à une vie transfigurée. Ainsi, tu seras habilité-e à communier dignement à mon Corps et à mon Sang. Et désormais Ma lumière s'intègrera en toi pour renouveler sans cesse cette transformation, afin que tu puisses ressembler davantage à la splendeur qui se révèle dans le mystère de la Transfiguration.

Souviens-toi de ce qu’ont entendu les Apôtres sur la Montagne ? La Voix de mon Père ; Celle-là même que tu entends particulièrement à chaque Eucharistie. Cette voix est mystérieuse mais claire dans ta vie. C’est elle qui t’appelle ici et maintenant. Si tu l’entends, ne ferme pas ton cœur (He 3,7-8).